Les valeurs morales sont au coeur de nos débats de société. Mais le prix à payer pour défendre ces valeurs est rarement évoqué. Que l'adhésion à un bien moral - l'écologie, la diversité, l'aide aux plus démunis... - dépende de son coût économique nous met mal à l'aise. Nous aimerions pouvoir faire des choix justes et bons « quoi qu'il en coûte ».
Or, précisément, défendre une valeur, c'est accepter d'en payer le prix. Pour avoir de beaux musées et promouvoir notre culture, consentons-nous à payer davantage d'impôts ? Pour préserver le lien social, acceptons-nous de subventionner certaines entreprises ? Souhaitons-nous accueillir plus de réfugiés au risque de saturer les services sociaux ? Les réponses que nous apportons à ces questions dessinent des préférences « économico-morales » aujourd'hui déterminantes dans nos sociétés. Car plus nos démocraties avancent, plus nos choix mettent en jeu à la fois nos intérêts et nos valeurs.
Ce livre propose, dans une démarche novatrice, d'intégrer la dimension non pécuniaire de nos vies (la liberté, l'identité, l'altruisme, la justice, la culture...) à l'analyse économique. À partir d'une vaste enquête internationale, à laquelle le lecteur peut lui aussi participer, il cartographie les préférences qui sont déterminantes pour comprendre comment tranchent les citoyens.
« Pour sauver l'emploi, il faut sauver l'industrie », « C'est à l'État de nous sortir du marasme et de préserver la croissance », « Les marchés, c'est la dictature du court terme », « La solution à la crise, c'est plus d'Europe ! » - voilà autant de clichés coriaces qui pourrissent le débat public en France, entretiennent la morosité et finissent par couler le pays.
Des évidences postiches et des mythes néfastes, qu'Augustin Landier et David Thesmar décryptent ici d'une plume acérée, dénonçant du même coup les lobbies qui les entretiennent et abordant au passage nombre de questions très concrètes. Pourquoi avons-nous peur de la robotisation ? À quoi doit servir un ingénieur à l'heure du numérique ? Pourquoi nos PME peinent-elles à trouver de l'argent ?...
Il est temps d'entrer dans l'ère postindustrielle, d'aller vers une société de services et une économie dématérialisée. Pour ce faire, finissons-en d'abord avec un capitalisme de subvention, empoisonné par la nostalgie des Trente Glorieuses. Telle est la cure de désintoxication à laquelle invite ce livre salutaire.
Édition augmentée 2014
Création Studio Flammarion
© Flammarion, 2013, pour l'édition originale
© Flammarion, 2014, pour la présente édition en coll. « Champs »
> Disponible prochainement
En France, le capitalisme financier est vécu comme une source insupportable d'aliénation et d'inégalité.
Or, ce livre en fait la démonstration, certains lieux communs du discours anti-capitaliste sont faux et doivent être dénoncés. Partout, le développement financier est un accélérateur de croissance. Les marchés n'induisent pas la myopie industrielle pour laquelle on les blâme, mais permettent le financement de projets de longue haleine. Pour comprendre ce malaise, un détour par l'histoire s'impose. Contrairement à une idée répandue, la France n'était pas prédisposée à l'anti-libéralisme.
C'est le succès mal interprété des Trente Glorieuses qui a nourri l'illusion qu'un a autre capitalisme serait possible. Notre économie reste largement structurée par l'héritage de l'après-guerre. La libéralisation des années 1g8o, stoppée en rase campagne, a donné naissance à un capitalisme schizophrène: un patronat hésitant entre sa loyauté aux actionnaires ou aux salariés, des actionnaires en majorité étrangers et qui ne représentent pas une force politique.
Pour rendre au capitalisme sa légitimité, il faut faire des Français les acteurs à part entière d'un capitalisme financier dont ils doivent être les premiers bénéficiaires.
L'État est de retour sur le devant de la scène économique. Il aide les entreprises défaillantes, investit dans les secteurs jugés stratégiques, dit son mot sur la nomination des grands patrons, définit de nouvelles règles. Beau programme, sauf qu'en matière fiscale, bancaire ou industrielle, il y a un gouffre entre les effets d'annonce et la réalité.
Il ne suffit hélas pas d'invoquer l'intérêt général pour le promouvoir. Il n'y a pas de pilote bienveillant aux commandes de l'appareil d'État mais des hommes inévitablement dotés d'intérêts particuliers, guettant les prochaines élections, ou tout simplement soucieux d'optimiser leurs carrières.
Oublions donc la mythique neutralité d'un État aux mains propres et efficaces ! Fixons-nous plutôt des objectifs concrets, modestes et aux résultats contrôlables : livrer une information fiable et détaillée aux citoyens exigeants que nous sommes devenus, prêter une oreille attentive à nos critiques légitimes. Pour échapper à la tyrannie du court-terme et à la multiplication des réformes avortées, Augustin Landier et David Thesmar donnent le mode d'emploi d'une société translucide, autrement dit assez adulte pour sauver, dans la décennie qui s'ouvre, le modèle français.Augustin Landier est professeur d'économie à la Toulouse School of Economics. David Thesmar est professeur à HEC, membre du Conseil d'analyse économique auprès du Premier ministre. Tous deux ont coécrit Le Grand Méchant Marché (Flammarion, 2007).