Juillet 1937. À Home Place, au coeur du Sussex, jardiniers, femmes de chambre et cuisinière sont sur le pont. La Duche orchestre le ballet des domestiques avant l'arrivée de ses trois fils, Hugh, Edward et Rupert Cazalet, en chemin depuis Londres avec épouses, enfants et gouvernantes. Où dormira Clary, adolescente mal dans sa peau en plein conflit avec sa belle-mère ? Quelle robe portera Villy, ancienne ballerine désormais mère au foyer ? Polly, terrorisée à l'idée qu'une guerre éclate, s'entendra-t-elle avec sa cousine Louise qui rêve de devenir actrice ? Rachel, la seule fille de la Duche, trouvera-t-elle un moment pour ouvrir la précieuse lettre de son amie Sid ?
Non-dits, chamailleries, profonds chagrins... Aux préoccupations des adultes font écho les inquiétudes des enfants, et à la résilience des femmes, qu'elles soient épouses, fillettes ou domestiques, répond la toute-puissance - ou l'impuissance - des hommes. L'été regorge d'incertitudes mais, sans l'ombre d'un doute, une nouvelle guerre approche : entre pique-niques sur la plage et soirées auprès du gramophone, il faudra inventorier lits de camp et masques à gaz.
À la ligne est le premier roman de Joseph Ponthus. C'est l'histoire d'un ouvrier intérimaire qui embauche dans les conserveries de poissons et les abattoirs bretons. Jour après jour, il inventorie avec une infinie précision les gestes du travail à la ligne, le bruit, la fatigue, les rêves confisqués dans la répétition de rituels épuisants, la souffrance du corps. Ce qui le sauve, c'est qu'il a eu une autre vie. Il connaît les auteurs latins, il a vibré avec Dumas, il sait les poèmes d'Apollinaire et les chansons de Trenet. C'est sa victoire provisoire contre tout ce qui fait mal, tout ce qui aliène. Et, en allant à la ligne, on trouvera dans les blancs du texte la femme aimée, le bonheur dominical, le chien Pok Pok, l'odeur de la mer.
Par la magie d'une écriture tour à tour distanciée, coléreuse, drôle, fraternelle, la vie ouvrière devient une odyssée où Ulysse combat des carcasses de boeufs et des tonnes de bulots comme autant de cyclopes.
La paix est enfin signée, Rupert est de retour après cinq ans d'absence et la famille décide de quitter Home Place pour retourner vivre à Londres. Mais l'Angleterre est ébranlée, tout comme les certitudes et les moeurs des Cazalet. La mort du Brig et le divorce d'Edward et de Villy apportent leur lot de tensions. Les plus âgés des enfants Cazalet sont désormais adultes. Louise s'ingénue à trouver des échappatoires à son mariage, et tente de revenir à sa première passion, le théâtre. Clary est devenue secrétaire d'un agent littéraire tyrannique, tandis que Polly est assistante dans une entreprise de décoration d'intérieur. Ami et proche confident, le personnage d'Archie se révèle plus que jamais le dépositaire des secrets de la famille. La difficile reconstruction, dans un Londres profondément éprouvé par six années de guerre, est le théâtre de ce « nouveau départ », où chaque Cazalet prend conscience que l'heure est venue de surmonter les épreuves passées.
Mars 1942. La guerre suit son cours. Sybil vient de succomber au cancer qui la rongeait. Rupert n'a plus donné signe de vie. Le quotidien à Home Place est rythmé par le deuil, les restrictions de nourriture et de chauffage, l'attente de nouvelles à la radio. Polly et Clary ont dix-sept ans et s'installent à Londres pour y trouver du travail. Louise abandonne ses rêves d'actrice pour épouser Michael, officier dans la Marine, qui passe son temps en mer tandis que Louise donne naissance à Sebastien. Rachel, plus que jamais dévouée à ses parents, n'a plus de temps pour sa précieuse amie Sid : leur amour est voué à l'échec. Zoë s'éprend d'un officier américain. Maternité, mariage, amours contrariées et conflit où seuls les hommes partent combattre : dans ce volume qui se clôt sur la victoire finale en mai 1945 et la découverte des camps, l'émancipation toute progressive des femmes est drapée d'un voile tragique.
Winchester, 1932. Violet Speedwell, dactylo de trente-huit ans, fait partie de ces millions de femmes restées célibataires depuis que la guerre a décimé toute une génération de fiancés potentiels. « Femme excédentaire », voilà l'étiquette qu'elle ne se résigne pas à porter, à une époque où la vie des femmes est strictement régentée. En quittant une mère acariâtre, Violet espérait prendre son envol, mais son maigre salaire lui permet peu de plaisirs et son célibat lui attire plus de mépris que d'amis. Le jour où elle assiste à un curieux office à la cathédrale, elle est loin de se douter que c'est au sein d'un cercle de brodeuses en apparence austère - fondé par la véritable Louisa Pesel - qu'elle trouvera le soutien et la créativité qui lui manquent. En se liant d'amitié avec l'audacieuse Gilda, Violet découvre aussi que la cathédrale abrite un tout autre cercle, masculin cette fois, dont Arthur, sonneur de cloches, semble disposé à lui dévoiler les coulisses.
À la radio, on annonce l'arrivée d'un certain Hitler à la tête de l'Allemagne.
Septembre 1939. La Pologne est envahie et la famille Cazalet apprend l'entrée en guerre de l'Angleterre. À Home Place, la routine est régulièrement bousculée par les raids allemands. Louise rêve toujours de jouer Hamlet mais doit d'abord passer par une école de cuisine. Au grand dam de sa famille, elle fume, porte des pantalons, découvre la sexualité et fait ses débuts en tant qu'actrice dans un sinistre théâtre de province. Clary, dont le père, Rupert, est porté disparu sur les côtes françaises, renseigne scrupuleusement chaque parcelle de sa vie dans des carnets. Polly, inquiète de la mystérieuse maladie de sa mère, se lie d'amitié avec le cousin de Louise, Christopher, dont les discours pacifistes ont de plus en plus de mal à convaincre. Zoë, la femme de Rupert, a donné naissance à une fille et connu un profond bouleversement. Le volume se clôt sur l'attaque de Pearl Harbor : de Home Place à Londres, la guerre et la terreur d'une possible défaite ne semblent jamais très loin.
Cornouailles, 1947. Comme tous les étés, le révérend Seddon rend visite au père Bott. Hélas, son ami n'a pas de temps à lui accorder cette année, car il doit écrire une oraison funèbre : l'hôtel de Pendizack, manoir donnant sur une paisible crique, vient de disparaître sous l'éboulement de la falaise qui le surplombait. Et avec lui, sept résidents...
Dans cette maison reconvertie en hôtel par ses propriétaires désargentés étaient réunis les plus hétéroclites des vacanciers : une aristocrate égoïste, une écrivaine bohème et son chauffeur-secrétaire, un couple endeuillé, une veuve et ses trois fillettes miséreuses, un chanoine acariâtre et sa fille apeurée... Le temps d'une semaine au bord de la mer dans l'Angleterre de l'après-guerre, alors que les clans se forment et que les pires secrets sont révélés, les fissures de la falaise ne cessent de s'élargir...
Auteure talentueuse et espiègle, Margaret Kennedy pousse à leur comble les travers de ses personnages dans une fable pleine d'esprit et de sagesse.
Ce Festin est un régal !
Le 1er décembre 1969, Teddy, Lincoln et Mickey, étudiants boursiers dans une fac huppée de la côte Est, voient leur destin se jouer en direct à la télévision alors qu'ils assistent, comme des millions d'Américains, au tirage au sort qui déterminera l'ordre d'appel au service militaire de la guerre du Vietnam. Un an et demi plus tard, diplôme en poche, ils passent un dernier week-end ensemble à Martha's Vineyard, dans la maison de vacances de Lincoln, en compagnie de Jacy, le quatrième mousquetaire, l'amie dont ils sont tous les trois fous amoureux.
Septembre 2015. Lincoln s'apprête à vendre la maison, et les trois amis se retrouvent à nouveau sur l'île. À bord du ferry déjà, les souvenirs affluent dans la mémoire de Lincoln, le "beau gosse" devenu agent immobilier et père de famille, dans celle de Teddy, éditeur universitaire toujours en proie à ses crises d'angoisse, et dans celle de Mickey, la forte tête, rockeur invétéré qui débarque sur sa Harley. Parmi ces souvenirs, celui de Jacy, mystérieusement disparue après leur week-end de 1971. Qu'est-il advenu d'elle ? Qui était-elle réellement ? Lequel d'entre eux avait sa préférence ? Les trois sexagénaires, sirotant des bloody-mary sur la terrasse où, à l'époque, ils buvaient de la bière en écoutant Creedence, rouvrent l'enquête qui n'avait pas abouti alors, faute d'éléments. Et ne peuvent s'empêcher de se demander si tout n'était pas joué d'avance.
' On aurait dit que la nature avait organisé un gigantesque raout de bouteilles, auquel elle avait convié un étrange aréopage de plantes tempérées, tropicales et subtropicales. Les palmiers se penchaient paresseusement et les épineux s'enroulaient autour d'eux en une étreinte enivrée ; des fleurs élégantes voisinaient avec des cactées mal rasées et les palos borrachos pansus, tels des buveurs de bière, formaient avec le sol un angle inquiétant. Au milieu de cette ivresse florale, les tyrans, au plastron immaculé, s'affairaient comme des garçons de café. '
Publié en 1956, La Forêt ivre est l'un des premiers livres de Gerald Durrell, qui retrace le voyage du naturaliste-écrivain et de sa femme en Argentine puis dans la forêt du Chaco, au coeur du Paraguay. Après plusieurs mois à observer, capturer et soigner des espèces rares d'animaux, après les défaillances des compagnies aériennes, les nuées de moustiques et autres coups de bec assassins, une révolution les forcera à quitter le pays. Déconvenue qui n'enlève rien à l'aventure, rapportée avec tout le charme et la drôlerie dont Gerald Durrell continuera de faire preuve au fil de son oeuvre.
' De Kerouac, on a surtout lu Sur la route et Les Clochards célestes, mais on connaît peu The Town and the City. C'est pourtant le premier roman de Kerouac, publié en 1950, celui qui annonce l'inspiration fabuleuse d'un auteur prolifique."The Town", c'est en fait Galloway (Massachusetts), petite ville de tisserands où s'écoule une existence mi-rurale, mi-citadine, celle de la famille Martin, unie par l'affection mais surtout soucieuse de faire durer les bonheurs fragiles - le cidre qu'on boit au gallon, le chahut des polkas, et l'émoi des premières tendresses, sous les feuillées tremblantes. "The City", le New York des années 1940, en est la figure d'opposition, où le jeune Peter Martin entamera sa carrière de footballeur tout en découvrant l'ébullition de la vie urbaine, mais aussi la fureur poétique - le roman retrace l'émergence prometteuse de la Beat Generation, chacun des personnages de la "city" incarnant un adepte du mouvement : Leon Levinsky est Allen Ginsberg, Kenneth Wood est Lucien Carr, Will Dennison campe William Burroughs.
Il faut relire The Town and the City, ce roman sur lequel Kerouac a planché de 1946 à 1948, qui dépeint avec une gaieté triste, comme s'il s'agissait d'une civilisation vouée à disparaître, la beauté brute des cols bleus, la force de leurs traditions et de leur musique folk. '
Marion Bet, Zone critique.
Entre 1952 et 1954, Jack Kerouac sillonne les États-Unis, de New York à San Francisco, et s'échappe au Mexique, au Maroc, ou encore à Londres et Paris. Ses notes, prises sur le vif, s'accumulent dans des carnets.
La vie quotidienne en Caroline du Nord, le travail du serre-freins dans les dépôts de chemins de fer, les bruits dans les bois, les gens dans la rue, les filles, le vin, l'herbe... Orage approchant, brume grise, herbes folles, hôtels, bars, camions, lumières...
Autant d'images et d'impressions qui composent le motif de ce Livre des esquisses.
Au milieu des années cinquante, nombreux sont les écrivains de la Beat Generation à s'intéresser au bouddhisme et à se tourner vers le haïku, dont la forme épurée fait écho à leur quête de spiritualité. Si Jack Kerouac n'est pas le premier à expérimenter cette tradition poétique, il est selon Allen Ginsberg ' le seul maître du haïku '. Adaptant ces poèmes japonais de trois vers à la langue et à la culture américaines, il en vient à redéfinir le genre, qui l'accompagnera toute sa vie.
Novembre 1449, dix-huit ans après la condamnation pour hérésie de Jeanne d'Arc, Charles VII chasse les Anglais de Rouen. La fin de la guerre de Cent Ans est proche : il faut achever la reconquête du territoire, panser les plaies des provinces dévastées et réconcilier les partis engagés dans la guerre civile. Promettant le pardon et l'oubli, le roi ordonne pourtant une enquête sur le procès de 1431. Malgré la résistance d'une partie de l'Église et de l'Université, quelques hommes opiniâtres, rusant avec la raison d'État, vont rechercher preuves et témoins pour rétablir la vérité, le droit et l'honneur de la jeune fille.
Après Le Bon Coeur, Michel Bernard relate l'histoire d'une poignée d'hommes en quête de justice. Bouleversés par la parole qu'ils découvrent dans les actes du procès, ils conduiront Charles VII à rendre à Jeanne un peu de ce qu'elle lui a donné. Chez cet homme insaisissable qui fut un grand roi, ils feront jouer au bon moment le bon ressort. Il a le visage d'Agnès Sorel, la beauté morte fixée par Jean Fouquet.
"Quand Amed pleure, Aziz pleure aussi. Quand Aziz rit, Amed rit aussi."
Ces frères jumeaux auraient pu vivre paisiblement à l'ombre des orangers. Mais un obus traverse le ciel, tuant leurs grands-parents. La guerre s'empare de leur enfance et sépare leurs destins.
Amed, à moins que ce ne soit Aziz, devra consentir au plus grand des sacrifices. Conte moral, fable politique, L'Orangeraie est un roman où la tension ne se relâche jamais.
Un texte à la fois actuel et hors du temps qui possède la force brute des grandes tragédies et le lyrisme des légendes du désert.
L'Orangeraie a remporté plusieurs prix dont le Prix des libraires du Québec.
Dans les années 1920, cinq jeunes vétérans de l'armée de l'air - Shepard Lambert, Bill Talbot, Johnny Swann, Cary Lockwood et Francis, dit le Washout - se retrouvent à Paris après l'Armistice, livrés à eux-mêmes. Incapables de reprendre leur souffle, ils semblent n'avoir qu'un but, celui de se noyer dans l'alcool. Ils rencontrent Nikki, jeune Américaine esseulée à Paris, et l'embarquent dans leur tournée spectaculaire des bars parisiens puis des cafés de Lisbonne et des corridas madrilènes.
Publié en feuilleton dans le magazine Liberty en 1930, sous le titre Single Lady, ce roman inspiré de l'existence de Saunders n'est pas sans rappeler Le soleil se lève aussi : les clins d'oeil à Hemingway y sont nombreux, et ne font qu'ajouter au charme et à la drôlerie d'une histoire pourtant tragique.
Adaptée au cinéma peu après sa parution, elle est devenue Le Dernier Vol, l'un des meilleurs films de l'époque sur la génération perdue.
L'histoire des St. Charles est celle d'une famille anglo-irlandaise, noble mais ruinée, vivant dans un mélange d'élégance et de décrépitude, et qui refuse de prendre en compte les réalités contemporaines. La narratrice, Aroon, est la fille de la maison. Mal aimée par sa mère, éperdue d'admiration pour son père, elle passera toute sa vie à Temple Alice, et finira par devenir une vieille fille dure, oscillant entre la nostalgie et la violence intérieure. Derrière le monde de rêve et de bonnes manières que décrit Aroon, le lecteur devine la vérité des passions tragi-comiques qui détruisent les St. Charles.
Par-delà sa peinture acérée des moeurs d'une classe
sociale et des vices d'un système néo-féodal, Molly Keane bâtit un roman familial parcouru de névroses et de tabous universels.
Éditrice dans une maison d'édition sur le point d'être rachetée, la narratrice de ce livre était au fond du trou le jour où elle a inventé Duchess Goldblatt. Récemment divorcée, elle devait apprendre à ne plus voir son fils qu'une semaine sur deux ; trouver une maison où vivre ; se rendre régulièrement chez son avocate et chez sa psychologue ; devait, aussi, se rendre à l'évidence : elle était seule. Amis et connaissances l'avaient délaissée, préférant se ranger dans le camp de son ex-mari, ou simplement s'épargner le cynisme de cette grande gueule, aussi dévastateur pour les autres que pour elle. C'était à se demander si elle n'avait pas fait exprès de s'entourer de gens dont elle aurait dû se douter, dès le début, qu'ils finiraient par la lâcher.
Toujours est-il qu'à ce moment de sa vie, la liberté de l'anonymat, l'univers encore inexploré des réseaux sociaux et l'envie d'échapper à une vie qui se délitait la pousse à se créer un avatar, celui d'une vieille dame de 81 ans, originaire de Klein, au Texas, et résidant à Crooked Path, dans l'État de New York, auteure de best-sellers parmi lesquels Quelques comptes à régler (des Mémoires familiales), Pas si je te tue en premier (une contemplation des relations mère-fille), ou encore Festoyer de la carcasse de mes ennemis : Une histoire d'amour. Avatar qui prendra bientôt le pas sur sa créatrice, semblant s'exprimer d'elle-même sur la Toile à travers de délicieux tweets pareils à des haïkus, et répondant avec une bonté nouvelle, une sagesse méconnue, aux messages de ses abonnés toujours plus nombreux.
Le cercle d'admirateurs - 55 000, quand même ! parmi lesquels le chanteur Lyle Lovett et nombre d'écrivains - qui s'est formé autour de Duchess depuis 10 ans, est en quelque sorte devenu celui de la narratrice, lui redonnant goût à la vie.
Leurs deux histoires se mêlent dans ce livre à l'humour décapant, qui célèbre à la fois le pouvoir des mots et la joie d'écrire.
Quand Honor Bright se décide à franchir l'Atlantique pour accompagner, au coeur de l'Ohio, sa soeur promise à un Anglais fraîchement émigré, elle pense pouvoir recréer auprès d'une nouvelle communauté le calme de son existence de jeune quaker : broderie, prière, silence. Mais l'Amérique de 1850 est aussi périlleuse qu'enchanteresse ; rien dans cette terre ne résonne pour elle d'un écho familier. Sa soeur emportée par la fièvre jaune à peine le pied posé sur le sol américain, Honor se retrouve seule sur les routes accidentées du Nouveau Monde. Très vite, elle fait la connaissance de personnages hauts en couleur. Parmi eux, Donovan, 'chasseur d'esclaves', homme brutal et sans scrupules qui, pourtant, ébranle les plus profonds de ses sentiments. Mais Honor se méfie des voies divergentes. En épousant un jeune fermier quaker, elle croit avoir fait un choix raisonnable. Jusqu'au jour où elle découvre l'existence d'un 'chemin de fer clandestin', réseau de routes secrètes tracées par les esclaves pour rejoindre les terres libres du Canada. Portrait intime de l'éclosion d'une jeune femme, témoignage précieux sur les habitudes de deux communautés méconnues - les quakers et les esclaves en fuite -, La Dernière Fugitive confirme la maîtrise romanesque de l'auteur du best-seller La Jeune Fille à la perle.
Hiver 1870, le capitaine Jefferson Kyle Kidd parcourt le nord du Texas et lit à voix haute des articles de journaux devant un public avide des nouvelles du monde : les Irlandais migrent à New York ; une ligne de chemin de fer traverse désormais le Nebraska ; le Popocatepetl, près de Mexico, est entré en éruption. Un soir, après une de ses lectures à Wichita Falls, on propose au Capitaine de ramener dans sa famille,
près de San Antonio, la jeune Johanna Leonberger. Quatre ans plus tôt, la fillette a assisté au massacre de ses parents et de sa soeur par les Kiowas qui l'ont épargnée, elle, et élevée comme une des leurs. Le vieil homme, veuf, qui vivait jadis de son métier d'imprimeur, profite de sa liberté pour sillonner les routes, mais l'argent se fait rare. Il accepte cette mission, en échange d'une pièce d'or, sachant qu'il devra se méfier des voleurs, des Comanches et des Kiowas autant que de l'armée fédérale. Sachant aussi qu'il devra apprivoiser cette enfant devenue sauvage qui guette la première occasion de s'échapper. Pourtant, au fil des kilomètres, ces deux survivants solitaires tisseront un lien qui fera leur force.
Dans ce splendide roman aux allures de western, Paulette Jiles aborde avec pudeur des sujets aussi universels que les origines, le devoir, l'honneur et la confiance.
1726, Godalming. John Howard, médecin et chirurgien, enseigne les vertus de la rationalité à son apprenti Zachary Walsh, le fils du pasteur. Son savoir est toutefois mis à rude épreuve le jour où la femme d'un paysan des environs donne naissance à un lapin, mort et démembré. Faut-il y voir une volonté divine ?
Quand cet événement isolé devient chronique, John comprend que rien dans son expérience de médecin de campagne ne l'a préparé à résoudre une telle énigme. Il s'en remet aux meilleurs chirurgiens londoniens et, l'affaire étant parvenue aux oreilles du roi George, Mary est transportée à la capitale.
Miracle, monstruosité, punition divine, malformation rarissime... ou supercherie ? Tout l'art de Dexter Palmer est de faire douter le lecteur du XXIe siècle, qui finit par attendre, lui aussi, un nouveau miracle.
Le monde est recouvert de neige.
Les transports sont interrompus.
Tom doit s'aventurer dans un paysage métamorphosé et hostile pour aller chercher son fils, malade et coincé dans une résidence étudiante.
Mais lors de ce trajet solitaire en voiture, de Belfast à Sunderland, Tom se retrouve à faire un autre voyage, sans carte ni guide, et retrace chaque route d'une histoire familiale habitée de souvenirs et embrumée de regrets.
Écrit dans une prose épurée et cristalline par l'une des voix les plus importantes de la littérature irlandaise contemporaine, Voyage en territoire inconnu est une oeuvre au dépouillement exquis et à la grâce transfiguratrice. Un roman de pères et de fils, de chagrin, de mémoire, de famille et d'amour ; sur les gouffres qui nous séparent de ceux que l'on aime, et les mauvais tournants que l'on prend en allant les retrouver.
"Des personnages de bonne volonté, dont le courage s'accommode aimablement d'un peu d'absurdité charmante, ont promené leurs mains à travers des greniers de bibliothèques et des caves de journaux pour assembler une centaine de chroniques, élues parmi les quelque deux mille articles que je m'étais appliqué à égarer depuis quarante ans."
Une myriade d'amis, de sportifs, d'écrivains, d'artistes et de personnalités politiques se promène dans ces chroniques, écrites par Antoine Blondin entre 1943 et la fin des années 1980. Aux côtés de Paul Morand, Marcel Aymé ou Jean Giraudoux pédalent Jacques Anquetil et Louison Bobet, tandis que la Callas, "plus radieuse qu'une aube", chante Norma la Douce au Palais Garnier et que les académiciens Goncourt en prennent pour leur grade, "précédés par leur canne, leur ventre ou leur réputation".
"Combien de fois ne m'a-t-on pas demandé d'éclairer le sens de ce "deux" ! du verbe "se douloir", fréquemment usité au Moyen-Âge et signifiant souffrir, plus au plan moral que physique. Apollinaire l'a fait revivre dans son Guetteur mélancolique, en optant pour cette belle graphie qui donne 2 aussi.
J'ai envie de suggérer aux lectrices, aux lecteurs de commencer par la fin, à savoir par la table, qui se trouve être une sorte de "comptoir" : histoire de dire que j'aime presque autant les chiffres (surtout si je pense à Queneau) que les lettres, il y a tant de bâtons dans nos roues ! Ce petit livre parle d'amitié surtout."
Valérie Rouzeau
Jim agite doucement la main en refermant la porte derrière sa femme Annie qu'il a envoyée faire des courses. Il enroule alors soigneusement son pardessus dans le sens de la longueur et le pose au pied de cette même porte. À son retour, c'est un miracle si Annie ne fait pas sauter la maison entière en craquant une allumette dans l'appartement rempli de gaz.
Les chevilles enflées après une journée à faire l'aumône, soeur Saint-Sauveur prend la relève des pompiers auprès de la jeune femme enceinte et des voisins sinistrés de ce petit immeuble de Brooklyn. La nouvelle du suicide étant déjà parue dans le journal, elle échouera à faire enterrer Jim dans le cimetière catholique, mais c'est très vite toute la congrégation qui se mobilise : on trouve un emploi pour Annie à la blanchisserie du couvent où sa fille Sally grandit sous l'oeil bienveillant de soeur Illuminata, tandis que soeur Jeanne lui enseigne sa vision optimiste de la foi. Et quand cette enfant de couvent croira avoir la vocation, c'est l'austère soeur Lucy qui la mettra à l'épreuve en l'emmenant dans
sa tournée au chevet des malades.
"Si j'étais Dieu, avait coutume de dire soeur Saint-Sauveur, je ferais les choses autrement." À défaut de l'être, les Petites Soeurs soignantes des Pauvres Malades, chacune avec son histoire et ses secrets, sont l'âme d'un quartier qui est le véritable protagoniste du roman d'Alice McDermott.