Il y a des chrétiens heureux pour lesquels l'histoire a un sens et l'homme un avenir : Jean Delumeau en témoigne. Il croit à la beauté de Dieu et du monde, non sans s'interroger sur la permanence du mal ; il croit en l'harmonie de la science et de la religion. Comme Montaigne et Pascal, il met en relief la nécessité d'une Révélation et explique pour les hommes d'aujourd'hui la richesse et l'actualité du credo chrétien. Hors de toute polémique, il affronte aussi les préoccupations concrètes qui sont celles de tout croyant. Sur l'oecuménisme, la théologie de la libération, la contraception, l'avortement ou la fécondation artificielle, il prend position avec la plus grande netteté, mais aussi avec les nuances qu'impose le respect des opinions en présence.
J'ai trop écrit, au fil des années, sous la pression de l'événement, de l'émotion, de la nécessité, pour n'avoir pas furtivement exprimé, ici ou là, ce que je crois.
Mais ce ne fut jamais délibéré, au contraire.
Outre l'inévitable impudeur du "Je", il est incompatible avec ce que je crois être le bon journalisme où il convient de s'effacer autant qu'il est possible derrière son sujet.
Engagée, pendant près d'un demi-siècle, dans des activités quasiment frénétiques laissant peu de place à la réflexion intemporelle, sollicitée fortement par le quotidien, l'idée ne me serait pas venue de me contraindre à formuler "ce que je crois" si l'éditeur ne m'avait demandé d'ajouter un titre à cette collection.
C'est toujours une épreuve d'écrire, hors du lyrisme qui gonfle seul la voile des mots et qui n'est pas dans mes cordes plus que l'effusion.
C'est une épreuve d'un genre particulier de s'obliger à mettre noir sur blanc ce qui s'accommode mieux du flou, du vague, de l'informulé.
Et puis, quand on décolle des faits, on tombe si facilement dans ce jargon que l'on baptise spiritualité...
J'ai mis vingt ans à savoir que le ciel, pour moi, était vide et qu'aucun secours ne me viendrait de là. Ni d'ailleurs, mais ce fut un peu plus long.
F. G.
Le "credo" de l'écrivain, journaliste et philosophe français, Maurice Clavel.
" Ce livre, écrit François Mauriac, ne s'adresse ni aux savants, ni aux philosophes, ni aux théologiens. j'ai voulu répondre le plus simplement possible à la question : " Pourquoi êtes-vous demeuré fidèle à la religion dans laquelle vous êtes né ? " C'était m'exposer à faire le jeu de l'adversaire. Le risque est à la mesure de la simplicité et de la naïveté qui m'auront tenu à genoux, durant toute ma vie, mais qui, de l'enfance à la vieillesse, m'auront permis de sentir, de toucher, de posséder un amour que je ne voyais pas. " Et il est vrai que la sincérité d'un tel ouvrage en fait un message bouleversant qui concerne tous les hommes.Si François Mauriac y retrace son itinéraire spirituel, sans omettre les objections contre l'Eglise qu'il eut le plus de mal à surmonter (à dix-huit ans il faisait déjà ses délices d'Anatole France), il nous passionne par les confidences sur lui-même, sur sa famille et sur son enfance, à laquelle on sait avec quel plaisir il revient toujours. Mais, dépassant son cas personnel, il engage sa foi dans le siècle, et nous rappelle " qu'il n'est pas d'autre politique permise au chrétien que la recherche du royaume de Dieu et de sa justice. "Ouvrage pathétique, par la lutte qui se laisse voir à chaque page entre l'homme et le chrétien, l'homme qui avoue son " hédonisme inguérissable ", le chrétien qui se répète la parole de Saint Jean : " Et si notre coeur nous condamne, Dieu est plus grand que notre coeur ". Le Ce que je crois de François Mauriac parle à l'oreille de chacun de nous, et l'oblige au tête-à-tête avec sa propre conscience. Un grand livre : l'un des plus grands dans l'oeuvre du grand écrivain.
« On n'écrit pas sans scrupules sous un tel titre. Et pourquoi moi ? Quel droit ai-je à le faire ? Je suis d'une manière très générale plein de méfiance pour les « je », mais plus particulièrement pour le mien, si je puis dire, et, à l'instant de commencer une telle profession de foi, j'espère que mes lecteurs sont dans la même disposition et je les prie de ne voir dans ces déclarations aucun orgueil, aucune vaniteuse assurance, ni surtout aucun désir de séduire qui que ce soit à mes pensées. Il ne s'agit que de chercher ensemble la vérité. Au delà de ma propre foi, je n'ai jamais cessé de sentir que chacun vit comme il peut. Le débat avec soi-même est le plus difficile qui soit et l'honneur d'un homme est souvent à la mesure de cette difficulté même. Ainsi suis-je plein de respect et d'amitié pour beaucoup d'hommes qui croient ce que je ne crois pas ou ne croient pas ce que je crois. Sans doute, quand on croit ensemble, la vie en est plus plaisante et plus chaude. Mais que chacun croie ce qu'il croit, pense ce qu'il pense. J'ai horreur du dogmatisme et du prosélytisme, et je ne me cherche point de disciples. »Jean Guéhenno
A douze ans, en 1951, il milite aux Jeunesses communistes. Il adhère ensuite à l'UEC pour s'opposer à la guerre d'Algérie, puis devient médecin. Il découvre à Cuba la violence castriste. Alors il passe de la politique à l'aventure et parcourt la plupart des guerres civiles et des lieux de désastre. Gastro-entérologue, il apprend sur le terrain la chirurgie de guerre. C'est l'époque des French Doctors, de Médecins sans Frontières puis de Médecins du Monde : la Jordanie de Septembre noir, les tremblements de terre en Amérique latine et en Afrique, le Kurdistan, l'Irlande du Nord, la chute de Saïgon, les boat-people en Mer de Chine, Beyrouth, l'Afghanistan, la Somalie, récemment le Rwanda massacré. Des millions de morts. Pour que tout cela trouve un écho, Bernard Kouchner prend souvent la parole. Très souvent. Devenir ministre de l'Action humanitaire et de la Santé donne plus de portée à sa voix. Ainsi peut naître son "droit d'ingérence", consacré par l'ONU. Dès la première phrase, Bernard Kouchner donne le ton : "Je crois qu'il faut s'attendre au pire : c'est la meilleure façon de rester optimiste...".
Dans la célèbre collection où se sont exprimés les personnalités les plus diverses, le Ce que je crois d'Hervé Bazin suscitera sans doute autant de sympathies que de polémiques.
Au long d'une oeuvre, dont la critiquer a reconnu la cohérence, le romancier a créé des personnages dont les idées ne sont pas forcément les siennes ou les illustrent parfois a contrario. D'où l'intérêt de cet ouvrage, écrit sur le ton modeste, mais dans le style nerveux propre à l'auteur de Vipère au poinget de Madame Ex.L'écrivain, ici, disparaît derrière l'homme qui ne se contente pas de dire ce qu'il pense des grands problèmes existentiels (la religion, l'origine de la vie, la mort, l'amour le choix de société), mais se complète par l'exposé très vif de ses "croyances pratiques" concernant la libération de la femme, le malaise de la jeunesse et de la famille, l'avenir de l'Europe ou l'aventure spatiale.
On découvrira chez Hervé Bazin une culture philosophique et scientifique, que ses romans n'affichaient pas, et une hauteur de vues qui lui permet, au dernier chapitre, d'énumérer les causes de la "crise planétaire" et de conclure que l'espèce humaine, malade d'avoir "à se mesurer, trop tôt, avec des moyens dont la puissance dénature les fins", est en train de passer son "suprême examen", avant la promotion finale ou la disparition.
L'appel qu'André Chouraqui fait entendre de Jérusalem se situe au coeur des vocations de cette cité, dont la voix retentit quand le monde est en péril de mort. Le témoignage est ici le fruit d'une vie qui se déploie à partir de trois pays et de trois cultures :l'Algérie, où il naît et dont il évoque les souvenirs, non sans nostalgie ni truculence ;la France, où sa pensée se forge à l'heure de Hitler, tandis qu'il prend part aux luttes de la Résistance ;Israël enfin, où se situent les sources de ses traditions ancestrales et son espoir d'une réalisation des idéaux de la Bible, dont il a publié récemment une traduction magistrale.Le regard que Chouraqui jette sur le monde moderne s'angoisse des germes de mort qu'il y décèle. Son livre explique de l'intérieur l'univers des Hébreux, les raisons de la survivance juive et de la renaissance d'Israël. Il nous donne des clés pour comprendre l'affrontement de l'hellénisme et de l'hébraïsme, les rivalités théologiques de l'Eglise et de la Synagogue, l'antisémitisme chrétien, les guerres judéo-arabes.
À l'heure où tant de chrétiens traversent une crise d'incertitude au point de ne plus oser proclamer leur foi, Jean Guitton confesse qu'il croit en Dieu, en Jésus-Christ, en l'Église. S'il récuse un triomphalisme qui a coupé trop souvent l'Église des hommes, il dénonce chez beaucoup la perte du sens de la vérité. La tolérance doit se fonder sur la conviction et non s'établir sur le doute et le compromis. Défendre l'intégrité de sa foi, ce n'est pas être intégriste, c'est être catholique. " Pour moi, écrit Jean Guitton, le catholicisme et la vérité sont des choses identiques. "
Cette certitude relève d'une foi éprouvée et n'a rien à voir avec l'abandon de l'esprit critique. Par vocation (il est professeur de philosophie), par tempérament, Jean Guitton pense ce qu'il croit ; il cherche sans cesse un accord entre l'énoncé de sa foi et son expérience d'homme. Il est un homme de progrès, qui a oeuvré toute sa vie à la préparation de Vatican II : le concile de l'union et de l'amour.
Mais ce livre dépasse l'actualité présente. Analysant avec soin les motifs les plus secrets de sa foi, Jean Guitton apporte une pièce émouvante et nouvelle à ce dossier ouvert depuis tant de siècles, chez les juifs et les chrétiens : qu'est-ce que croire et pourquoi croire ?
Ce que je crois par Jean Guitton : un livre original et courageux, dense et court, fort et serein, où l'on sent une harmonie profonde entre la foi, l'expérience et la pensée.
Un livre qui s'adresse à tous : catholiques, chrétiens, incroyants, adversaires, pour leur poser, à la fin du second millénaire, le seul problème toujours présent. Témoignage d'un penseur et d'un écrivain. oeuvre de foi et de bonne foi.
Pour la troisième fois de son histoire, l'Europe vit un profond remue-ménage. Il y avait eu la substitution du monde chrétien à l'univers antique ; il y eut la Renaissance succédant au Moyen Age. Il y a, en ce XXe siècle, le lent ébranlement de l'ordre chrétien. Notre siècle, croit Claude Imbert, est celui du "grand passage". Son Ce que je crois constitue moins un corps de croyances que l'observation et l'analyse de ce grand passage : les territoires du Dieu chrétien sont lentement accaparés par la rationalité, le déterminisme scientifique, la libération des principes de plaisir, le refus de la mort, le défi du tiers monde...les signes sont multiples.
Peut-on quitter le monde ancien, son ancrage chrétien, son code culturel qui fonda une certaine idée de l'homme et de la démocratie sans que dépérisse notre système de libertés ? Oui, répond Claude Imbert, si une nouvelle Renaissance marie à notre nouvelle éthique individuelle une nouvelle idéologie de la liberté.