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Arts et spectacles
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Avec Christophe Bier, fils de Pic de la Mirandole et de Brigitte Lahaie, le bis a son Bossuet, le X son Savonarole et la culture populaire, depuis la gazette à un sou jusqu'aux dernières bobines de Jean-Pierre Mocky, son encyclopédiste le plus jubilatoire et son érudit le plus impitoyable. Tous les samedis à 22heures, en clôture de l'émission Mauvais Genres sur France Culture, comme pour offrir à l'ensemble un clou digne de ses déviances et le cimier d'un somptueux exercice rhétorique, le maître Bier, oeil bleu lorrain, diction au rasoir, veste stricte, escarpins Ernest et queue-de-cheval tchétchène, monte en chaire pour pleurer la mort d'un bisseux illustre, déplorer le départ d'un cinéaste navrant ou d'une cover-girl aussi mignarde que sa gloire fut brève, témoigner d'une lecture sulfureuse, chanter l'effort d'un fanzine unique en son mauvais genre ou pousser à la visite d'une exposition interdite. Avec sa minute Bier, Mauvais Genres isole son élixir et opère sa quintessence. Cette année 2017, alors que l'émission impossible commémore ses vingt ans, l'idée nous est venue de vous proposer la substantifique moelle de ses chroniques, cent trente deux invocations triées sur le volet. Le sommaire fait frémir, d'une nécrologie du nain Piéral à l'apologie de l'éditrice scandaleuse Marie-Laure Dagoit, en passant par les acteurs-gorilles ou les starlettes bavaroises, Sim ou Maciste, gros calibre ou vampires nues, fumetti italiens ou acromégales hollywoodiens, c'est tous les hors-pistes et les mis au ban, les monstres et les déviants qui sont panthéonisés par ce Malraux de la planète freak: entre ici Christophe Bier, avec ton cortège d'ombres!!!!
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L'admiration, c'est comme la boxe ! Un noble art qui réclame de savoir danser, mais danser sous l'insoutenable et soudaine emprise de l'enthousiasme, d'avoir le don de frapper juste et fort, les mots décochés droit à un plexus plus solaire que jamais, qui soulèvent le lecteur, enflent l'auditoire comme une bourrasque ! Et cet art d'adorer, d'aimer à ras bord, de se laisser saturer par la joie, le pianiste Romain Villet le possède, en vit, en soi et sur scène, plus qu'aucun autre. Celui qui le comble et l'électrise est cet Himalaya de tendresse harmonique, ce colossal bouddha joyeux, ce stellaire moissonneur de notes, cet Hercule aux mains de fée qui sue le swing et dissémine en riant de scintillantes gerbes de sons, l'homme nommé Oscar Peterson sous les doigts duquel les 88 notes du clavier tournent à la pépiante volière de paradis. Certes, il y a Erroll Garner, Thelonious Monk, Bud Powell ou Lennie Tristano, mais Oscar Peterson affiche un plain-pied serein, une grâce souriante et une évidente consanguinité avec l'enchantante puissance du verbe de My Heart Belongs to Oscar.
Un vertige que Romain Villet nous communique au fil de deux autres textes où s'épanouit sa foi dans le jazz, le dieu de l'instant, « arme de séduction lascive », son amour du trio, sainte trinité sonore, « mariage à trois du rythme, du spleen et de la révolte », un triptyque où se dit sa zigzaguante histoire d'amour avec cette musique dont « le swing fait battre la chamade au coeur de l'univers ». -
Denis Tillinac, romancier, essayiste et ici poète, nous invite à un cérémonial intime : traverser son Pont des regrets, un bouquet de poèmes qu'il dévide comme les couplets d'une romance villonesque, comme les longues stances d'un blues verlainien. Un recueil qui incite à la flânerie, qu'on lit en douceur, qui nous désaltère comme une source retrouvée, pour sentir là, présente et inentamée, la mémoire vive garante de survie, gardienne du présent.
Éparpillé en proses diverses, mon imaginaire d'écrivain a toujours retrouvé ses ports d'attache dans l'aventure poétique. Souvenirs obsédants, émotions glanées sur le fil de l'instant, songeries idéales, aveux peu glorieux, regrets embrumant des plages de bonheur - me voilà tout entier dans ce kaléidoscope.
Denis Tillinac -
Voici un homme qui reçoit la révélation de sa singularité en regardant des toiles de Bacon, qui au lieu de le blesser, vont prendre en charge ses propres douleurs. Il sortira de l'exposition libéré de ses terreurs.